La tendresse

La Tendresse

De : Julie BERES, Lisa GUEZ et Kévin KEISSI
avec la collaboration d’Alice ZENITER

Conception et mise en scène : Julie BERES
Chorégraphie : Jessica NOITA
Son et Musique : Colombine JACQUEMONT
Scénographie : Goury
Costumes : Caroline TAVERNIER et Marjolaine MANSOT
Lumières : Kélig LE BARS assistée de Mathilde DOMARIE

Aux Bouffes Parisiens

Jusqu’au 15 juin 2025

Avec (en alternance) :

Bboy Junior, Natan BOUZY, Marin DELAVAUD du Ballet de l’Opéra national du Rhin, Léopold FAURISSON, Bel Abbes FEZAZI, Saïd GHANEM, Guillaume JACQUEMONT, Alexandre LIBERATI, Tigran MEKHITARIAN, Djamil MOHAMED, Sacha NEGREVERGNE, Mathis ROCHE, Romain SCHEINER, Mohamed SEDDIKI

La tendresse ou comment la masculinité, nouveau terme employé souvent de façon hypocrite pour dire machisme voire misogynie, est déconstruite… Déconstruite, non ? Désinventée serait le mot juste. En effet, la virilité n’est-elle pas une invention d’une seule espèce animale : l’homme ? La guerre des sexes aura-t-elle lieu ?

Voici donc les questions auxquelles que l’ensemble des huit artistes va aborder. Une façon d’aborder un vaste sujet qui nous fait tanguer à plusieurs reprises d’une introduction à la violence malaisante et paradoxalement si maitrisée, si jouissive dans sa chorégraphie et son interprétation jusqu’à une conclusion dont on se doutait qu’elle serait nécessairement plus tendre.

Des chorégraphies maîtrisées donc mais pas seulement ! Dans La tendresse, chaque artiste performe dans des disciplines variées. Avez-vous déjà entendu un danseur classique de l’Opera de Paris rapper ?  Avez vu déjà un acrobate jouer la comédie de manière aussi naturelle ? La liste serait longue devant les talents multiples que chacun se partage et partage avec nous. La raison de ces performances : chaque artiste se livre à cœur ouvert avec son émotion, son exutoire. On est dans une démonstration de force et de douceur décomplexée où la compétition si chère à la gent masculine est effacée. Aucune volonté de se comparer et de crier à qui a la plus grosse. Sur ce point, bien sûr qu’on est conscient avant le spectacle que vu le thème, on n’y coupera pas, qu’on sera amené à voir un ou plusieurs sexes. Ca fait partie du décorum. Mais lorsque ce moment arrive, l’ensemble des éléments narratifs ou scénographiques qui l’accompagnent ainsi que le fait que ça ne traine pas sur la longueur (sans mauvais jeu de mots) fait qu’on en n’est pas gêné. En outre, la véritable exhibition est celle de leur cœur. Le patriarcat socio-culturel se fait fratrie, art, cas d’école.

Le tout est exposé dans un décor noir et brut, évidemment, parce que les mecs, c’est bien connu, ça n’aime que le noir et le minimalisme. C’est sans compter sur une mise en scène ultra léchée qui vient apporter toute la nuance, toute la couleur nécessaire et imperceptible par l’oeil. A propos de nuance et de mise en scène, la scénographie propose à plusieurs reprises une approche sous formes de fresque d’un réalisme à la beauté saisissante. Le texte est dit comme s’il s’agissait de poésie. Même un simple croisement de bras, une accolade prend un virage onirique qu’on n’explique pas. C’est un délire orgiaque qui vous prend, vous emporte, vous ramène dans son déferlement d’art et d’âme.

On note que les artistes sur scène, à l’instar de leur art ont tous une singularité différente et que plusieurs éléments de leur identité personnelle tels que prénom, origine, parcours ont été repris pour encore plus d’authenticité, encore plus de vérité. Le message est clair : il existe autant de sensibilités, autant de façons de s’exprimer qu’il existe d’hommes. Par ce parti pris, on en sera encore plus ému. On pourrait citer chacun des huit talents sur scène mais ce serait trop en dévoiler. On retiendra donc particulièrement Tigran, le plus réfractaire aux idées de reconnaitre le concept de masculinité comme désuet mais qi reste prêt à écouter et peut-être à évoluer Et s’il n’est pas un loup, il se tient en alpha bienveillant face à la meute. On sera subjugué par les défis gravitationnels de Bboy Junior. Ou encore, on sera ému aux larmes par les pas de danse sur pointes de Natan. Car oui, spoiler, un homme peut pleurer ! C’est ce qui se passera à plusieurs reprises, on a envie de pleurer sans vraiment savoir pourquoi. Pour l’esthétisme ? Pour remercier ? Pour le partage ? Pour la fascination ? Sûrement tout cela à la fois.

Oubliez ce que vous pensiez savoir sur le premier chiffre d’un numéro de sécurité sociale, adieu l’idée du mâle dominant et bienvenue à l’homme moderne. Un homme, qui pour autant, n’en devient pas invisible ni indivisible. Certains crieront, sans doute, au wokisme sans maîtriser le vocabulaire parce que c’est la mode chez les fascistes et les rétrogrades. Laissons-les dans leur petit monde rempli de cases rikiki.

Pour conclure, la preuve que le spectacle a séduit mais également convaincu, c’est qu’avant même que la lumière se rallument, les « bonhommes » du public ont déjà entamé la standing ovation méritée sans qu’une voisine prétendument orchidoclaste ne les ai poussés à cette érection. La testostérone s’est transformée en communion, en un « on sait » crié silencieusement sans que la virilité n’ait été effleurée. Et si c’était tout ça porter ses couilles avec élégance ?!

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L’histoire

« Ce titre La Tendresse, comme notre dernière création Désobéir, contient une ligne souterraine qui agit comme un programme.
Les filles de Désobéir devaient mentir aux autres pour s’affranchir des injonctions de la famille, de la société ou de la tradition.
Les garçons de La Tendresse, eux, ont souvent dû se mentir à eux-mêmes pour appartenir au « groupe des hommes », pour correspondre à la « fabrique du masculin ».
Pourtant, chacun à leur manière, ils ébranlent les assignations d’une identité d’homme fondée sur la performance, la force, la domination de soi et des autres.
En se demandant « comment être un mec bien aujourd’hui ? », ils font bouger les lignes d’une éducation reçue.
Nous postulons avec eux que c’est sans doute dans l’acceptation de sa vulnérabilité, dans l’accès à ses sentiments, dans la revendication d’une égalité de faits entre les hommes et les femmes (plutôt qu’une complémentarité de principes qui reste l’arme du patriarcat) – que réside l’une des clefs de la réinvention de soi. »

Julie Berès

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Aurélien

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