Le Chant du Loup (critique)

  • Date de sortie au cinéma : 20 février 2019
  • Durée du film :  1 Heure et 55 Minutes
  • Réalisé par : Antonin BAUDRY
  • Avec : François CIVIL, Mathieu KASSOVITZ, Reda KATEB et Omar SY
  • Genre : Thriller / Action

 

Synopsis – Le Chant du Loup

Un jeune homme a le don rare de reconnaître chaque son qu’il entend. A bord d’un sous-marin nucléaire français, tout repose sur lui, l’Oreille d’Or.
Réputé infaillible, il commet pourtant une erreur qui met l’équipage en danger de mort. Il veut retrouver la confiance de ses camarades mais sa quête les entraîne dans une situation encore plus dramatique.
Dans le monde de la dissuasion nucléaire et de la désinformation, ils se retrouvent tous pris au piège d’un engrenage incontrôlable. 

 

Miracle !

À l’heure où le box office français a pour figure de proue un bateau de croisière nommé «Grosse comédie potache» ou «Grosse comédie potache 2, le retour du tiroir-caisse», pour changer la donne, il fallait…un sous-marin !

Sous-marin, comme le développement de ce film dont on avait jamais entendu parler avant le Showeb de fin d’année 2018, tant la production (pourtant pharaonique) s’est déroulée en toute discrétion.
Pathé nous avait alors révélé, non sans fierté, le prologue haletant de ce thriller en eaux profondes.

Les effets spéciaux, le son, n’étaient pas finalisés, l’intrigue affleurait à peine à la surface mais déjà dans la salle, un frémissement…
Un souffle épique. Un battement.
Celui du sonar et celui du cœur de notre héros, bombardé de questions, comme le spectateur, sur la nature du vaisseau inconnu.

Le Chant du Loup nous fait entrer dans la peau de ce protagoniste par la porte de ses tympans.
Chanteraide (François CIVIL) est en effet «l’Oreille d’or» d’un sous-marin nucléaire français.

Un sous-marin étant aveugle, L’Oreille d’or a la lourde tâche de déchiffrer l’environnement acoustique entourant le submersible. Frégate ? Cargo ? Animal ? Allié ? Ennemi ? C’est au diagnostic auditif précieux de cet homme qu’est suspendu un équipage et, par extension, une nation tout entière…

C’est alors que survient le mystère qui nous occupera une partie du film : quel est cet engin à quatre pales que l’Oreille d’or ne parvient pas à classifier ?
Énigme qui s’avérera être le point de départ d’un thriller sans précédent dans l’histoire du cinéma français (oui !).

Un miracle, donc.

Accoucher d’une première œuvre aussi ambitieuse, relève forcément un peu de cela.
Un miracle mais aussi un travail titanesque.
Antonin BAUDRY, le réalisateur, familier des milieux de la défense militaire et de la diplomatie française, a accompli un travail minutieux de collecte d’informations, d’immersion en plongée avec ces équipages et de création imaginaire (le film propose un récit d’anticipation dystopique totalement fictif).

Ce souci strict du détail, il l’a insufflé à ses acteurs, qui, eux aussi, ont dû partir à bord de ces monstres sur-armés et faire l’expérience d’une promiscuité à la fois fraternelle et étouffante.
Il a fallu également, pour les acteurs, se familiariser avec le jargon spécifique de ce milieu. Il en résulte un langage technique, nerveux, qui déroutera d’emblée le spectateur pour mieux lui faire perdre ses repères.

Le casting, lui aussi, est miraculeux : François CIVIL, Omar SY, Mathieu KASSOVITZ (qu’on n’avait plus vu aussi intense au cinéma depuis longtemps), Reda KATEB et Paula BEER sont tous excellents et parviennent à insuffler une humanité à des personnages par essence rigides car soumis aux ordres.

Impossible d’en dire plus sur l’intrigue, tant le film met en place un scénario aussi diaboliquement imprévisible que froidement crédible. Sachez simplement, que non, le film n’est pas une propagande militaire faisant la promotion de la force de notre armée, et c’est tant mieux.

Le Chant du Loup, mixé au Skywalker Ranch et monté par le monteur de La Mémoire dans la Peau et du Nouveau Monde de Terrence MALICK (!) est donc un assemblage de grande technicité, de tension psychologique et d’efficacité dans son suspens insoutenable.

Au générique final, on est scotché à son siège et l’oreille bourdonne; un silence profond règne pourtant dans la salle, preuve de la stupéfaction générale.
Que l’on apprécie ou non le genre de départ n’est plus la question : un frisson collectif vient de passer.
L’impression d’assister à une expérience cinématographique qui n’a laissé personne indifférent.

Voici le genre de films que l’on veut voir en France !
Un pari insensé, une prise de risque totale de la part de son auteur, sa production, ses comédiens, pour un résultat époustouflant, original, intelligent et d’une grâce inédite.

Du succès public du film dépendra sans doute sa qualification pour les cérémonies majeures du cinéma français (et pourquoi pas mondial) en 2020, tant Le Chant du Loup semble taillé pour la part du lion…mais que le milieu reconnaisse et adoube ce film ou non, l’oeuvre reste, et le public, nous l’espérons, ne passera pas à côté d’une telle pépite dans le paysage.

Clément

 

 

 

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